METEOSPACE

Télescopes de surveillance de l’activité solaire pour la Météorologie de l’espace Objectifs scientifiques du projet

METEOSPACE est un ensemble de petits instruments de surveillance de l’activité solaire destiné plus particulièrement aux applications de météorologie de l’espace (prévisions et suivi de l’activité) par le biais de la détection des phénomènes solaires rapides et transitoires :

  • les instabilités des filaments solaires, les filaments éruptifs étant pour partie associés au déclenchement des éjections de masse coronale (CME) ;
  • les éruptions solaires, également associées aux CME ;
  • les ondes chromosphériques de Moreton, associées également à l’onde coronale dont la contrepartie apparaît dans la basse couronne en rayonnement radio et dans la haute couronne blanche dans les observations coronographiques (SOHO LASCO).

METEOSPACE nécessite une résolution temporelle inégalée à ce jour en Europe (15 s), un site ensoleillé et une bonne qualité d’image. METEOSPACE doit fonctionner de concert avec des instruments à haute résolution temporelle et aux longueurs d’onde complémentaires, permettant de voir la progression des phénomènes vers la couronne, dont le Radiohéliographe de Nançay.

Image du soleil en Halpha
Image du soleil en Halpha

Disparition brusque d’un filament quiescent

L’instrument principal de METEOSPACE observera à CALERN/OCA dans la raie Hα, ce site bénéficiant de l’ensoleillement souhaitable. C’est dans cette raie que la matière froide des protubérances et des filaments est la mieux détectée, ainsi que les corridors dans lesquels se condense cette matière. Ces corridors tracent les lignes d’inversion du champ magnétique. 70 % des filaments éruptifs sont associées à des CME. Ces filaments s’élèvent graduellement dans les heures qui précèdent le déclenchement de nombreux CME puis le système protubérance/CME s’accélère brutalement pour atteindre des vitesses excédant plusieurs centaines de km/s. Les conditions climatiques des sites d’Europe continentale, font que cette phase de déclenchement a été rarement étudiée en Hα, car nécessite une difficile observation continue. De nombreuses observations spatiales (SOHO puis SDO) sont menées en HeII 304 A (EUV) dans le domaine complémentaire des températures de la transition chromosphère/couronne (80 000 K), mais la matière froide et dense (8000 K) y est invisible.

Les CME montrent une grande diversité morphologique et cinématique. De nombreux évènements solaires génèrent des CMEs dont la structure comporte trois parties et comprend une boucle brillante surplombant une cavité coronale qui contient un coeur central de matière dense en provenance du filament éruptif. La structure magnétique est étroitement liée à celle du filament sous-jacent (orientation, hémisphère solaire, polarités).

Une autre classe de CME concerne le développement dans la basse couronne de très grands évènements associés à une éruption chromosphérique (« Halo CME »). En l’espace de quelques minutes, le champ magnétique coronal va s’ouvrir sur une surface étendue pouvant excéder 100 degrés en longitude et latitude. Il mettent en jeu des des perturbations se propageant à des vitesses super alfvéniques. Des ondes de choc Moreton Hα ont été détectées pour certains de ces grands CME. Elles représentent la trace au niveau chromosphérique des ondes de choc coronales détectées en radio (sursauts de type II). Leur observation nécessite une cadence très rapide (15 s car elles balaient le disque solaire en 10 minutes), les résultats acquis reposent sur un nombre de cas très limités. Moins de 5 évènements ont pu être étudiés conjointement avec des observations d’imagerie radio. Observations conjointes Hα et imagerie radio avec le Radiohéliographe de Nançay permettent de suivre spatialement et temporellement l’évolution de ces phénomènes. Pour les quelques cas observés, il apparaît que ces ondes de choc « encerclent » le CME. Elles sont donc d’excellents traceurs de l’ouverture du champ magnétique coronal et de l’expansion en latitude des CME. Vu la rareté des observations, on ne peut généraliser un tel scénario, l’origine de ces ondes de Moreton et des chocs coronaux étant encore controversée. Les ondes de Moreton prennent toutes naissance dans le site éruptif ; s’agit il pour certaines d’une explosion ("blast waves") et pour d’autres de chocs entretenus sur les flancs des CMEs ("CME-driven chocs") ?

Onde de Moreton
Onde de Moreton

Développement d’une onde de Moreton Halpha (à gauche) lors d’une éruption (détail à droite)

Des ondes coronales ont été détectées par les télescopes Extrême UltraViolet de SOHO (EIT) et maintenant de SDO. La faible cadence d’acquisition de SOHO n’a pas permis de comprendre si une association existe entre ondes de Moreton et ondes EIT ; SDO, qui dispose en EUV d’une résolution temporelle d’une minute, devrait permettre de lever cette interrogation.

Ces résultats démontrent bien l’importance que revêtirait un programme d’observations continues avec une cadence temporelle inégalée de 15 s pour les applications de météorologie de l’espace, le suivi et la prévision de l’activité solaire. Tout programme concernant le lien entre l’activité solaire et l’environnement terrestre doit impérativement inclure plusieurs systèmes d’observations au sol tournés vers le soleil, permettant de recueillir des informations régulières et homogènes, avec un minimum de perturbations climatiques ou de « seeing ». La raie Hα est la raie la plus adaptée pour surveiller les phénomènes solaires dès leur naissance, bas dans l’atmosphère solaire, dans la chromosphère, à la source de l’activité solaire, comprenant :

  • les éruptions (phase de flash, phase graduelle) ;
  • les ondes de choc de type Moreton ;
  • les disparitions brusques des filaments et protubérances.
Images du Soleil en EUV
Images du Soleil en EUV

SDO EUV HeII 304 A (zone de transition chrmopshère couronne, 80000 K) et Fe 171 A (basse couronne 1.5 MK) à gauche ; RH Nançay en radio à 327 MHz à droite

Des observations solaires Hα sont réalisées à Meudon depuis longtemps ; néanmoins, si ce site est parfait pour obtenir quelques images par jour, à l’échelle du cycle solaire, il ne permet pas de suivre l’activité journalière en continu. La seule station européenne réalisant des observations continues en Hα est GONG, aux Canaries. La possibilité de s’installer à CALERN/OCA avec une équipe scientifique et technique locale expérimentée est une opportunité unique à saisir en Europe continentale en complémentarité totale avec Nançay pour la radioastronomie.

Des nouvelles du projet

  • Mai 2017 : la première image obtenue par le prototype MeteoSpace au Grand Sidérostat de Meudon, en Hα, avant son assemblage définitif par l’atelier du GEPI, et son transport à Calern pour le printemps 2018.

Quelques références :

  • Telescope H alpha pour la surveillance de l’activite solaire (projet TEHA) et la météorologie spatiale, étude CNES, 2006, par L. Blanco et J.-M. Malherbe
  • Pick, M. ; Malherbe, J.M. ; Kerdraon, A. ; Maia, D. : On the Disk Halpha and Radio Observations of the 2003 October 28 Flare and Coronal Mass Ejection Event, 2005, The Astrophysical Journal Letters, 631, L97
  • Maia, D. ; Aulanier, G. ; Wang, S. J. ; Pick, M. ; Malherbe, J.-M. ; Delaboudiniere, J.-P. : Interpretation of a complex CME event : Coupling of scales in multiple flux systems, 2003, Astronomy and Astrophysics, 405, 313
  • Wang, S. J. ; Maia, D. ; Pick, M. ; Aulanier, G. ; Malherbe, J.-M. ; Delaboudiniere, J.-P. : Research on a complex CME event including Halpha, LASCO, radio and MDI observations, 2005, Advances in Space Research, 36, 2273